TALIBÉS DE LA RÉPUBLIQUE ET PYROMANES DE LA LAÏCITÉ

Par Abdoul Aziz MBACKÉ Majalis

En comparant les gros titres alarmistes, ces derniers jours, de la plupart de nos médias sur la réouverture annoncée des lieux de culte au Sénégal, alimentées par les brûlots incendiaires de certains activistes zélés et autres « Talibés de la République ». Et les unes, aujourd’hui, beaucoup plus mitigées et moins chargées après ladite réouverture, l’on perçoit une certaine gêne ou même un dépit aisément compréhensible pour tout analyste attentif.

En effet, contrairement au capharnaüm prédit et au chaos obscurantiste, hautement pathogène et propagateur de Covid-19, auquel nous préparaient ces Cassandres médiatiques et leurs basses-cours d’oiseaux intellectuels de mauvais augure, dénonçant hardiment les « pressions maraboutiques sur une République capitulante et abdiquante », tout le Sénégal a vu le contraire. En lieu et place des postures malaisément justifiables de « lobbies religieux », exposant de façon irresponsable la vie de leurs « ouailles » dans les lieux de culte, l’on a plutôt vu un sens de l’organisation, un souci du respect des mesures barrières et une prise de conscience extraordinaires dans les mosquées de Touba, de Massalikoul Djinane, de Léona Niassène et beaucoup d’autres Maisons de Dieu. Un sens des responsabilités et une rigueur, certes perfectibles, mais de loin supérieures à ce que l’on a jusqu’ici constaté dans les autres lieux publics ouverts aux rassemblements (marchés, banques, boulangeries, transports…) pourtant techniquement beaucoup plus pathogènes.

Pourquoi nos médias et leurs fervents « Croisés de la Laïcité », pourtant d’habitude si friands d’informations sur dysfonctionnements et les failles des « élites religieuses », ne font-ils peu ou prou cas de ces « trains religieux qui arrivent à l’heure » ? Est-ce dû à la prévalence résiliente, dans notre système politique et intellectuel, du fameux paradigme laïciste, lie infâme du sang dégoulinant de la Religion guillotinée sur l’autel de la République des Lumières, récemment décrit sur les ondes de la RFM, avec une inouïe et rare naïveté, par le Directeur de la formation et de la communication au Ministère de l’Education nationale : « Personne ne peut dire quand prendra fin cette crise sanitaire. On peut fermer les mosquées et les églises SANS CONSÉQUENCES. Mais l’école ne peut continuer à être fermée sans conséquences. Si le Covid-19 doit être là pendant dix ans, qu’allons-nous faire ? Sinon apprendre à vivre avec ?»

Eskéy! Thiey Yàlla de la République:

Une autre et récente initiative de taille, qui méritait pourtant d’être reprise par les unes de tous nos journaux et que, paradoxalement, l’on n’a entendu dans aucune de nos croustillantes revues de presse, est celle du Khalife général des mourides, qui vient d’instruire officiellement l’organisation communautaire « Touba Ca Kanam » de prendre désormais en charge les familles de Touba placées en quarantaine pour cause de Covid-19 (voir https://youtu.be/iQKwS4NRltw). Croyez-vous un instant, qu’à contrario, ces mêmes journaux, dont on a vu le rôle de premier plan dans la récente campagne de stigmatisation des foyers religieux récalcitrants, hésiteraient un moment à faire des potentiels désagréments sanitaires causés par la réouverture des mosquées le chou gras de leurs quotidiens ?

Qu’est-ce qui peut bien expliquer ce traitement à sens unique et inique d’une certaine information religieuse dans notre pays ? D’où vient cet anticléricalisme atavique d’un « Axe du Mal » (médias – laïcards pseudo-intellectuels), ardents artisans d’un « Nouvel Ordre National » enfin débarrassé de l’influence néfaste des « chefferies religieuses féodales » ? Où sont cette fameuse déontologie et ce sens de la distance critique du traitement objectif de l’information enseignés dans toutes les bonnes écoles de communication ? Apparemment rangés aux oubliettes des immondes écuries d’Augias médiatiques, en vue des hypothétiques calendes sénégalaises de l’honnêteté intellectuelle…

Certains religieux qui, en toute bonne foi, refusent de rouvrir leurs lieux de culte, sont-ils assez conscients du piège de la pression psychologique subtilement carottée et du chantage de la stigmatisation insidieusement bâtonnée dans lequel certains médias des mille collines les pousse ndank-ndank ? En distribuant abondamment les bons points des leaders religieux « responsables, citoyens et républicains », censés être plus soucieux de l’intérêt public et du progrès de la nation, car ayant pris la mesure allant dans le sens de leurs desiderata de maintenir la fermeture des lieux de prières et d’imploration du Seigneur, Tout-Puissant. Tout en les opposant artificiellement et perfidement aux prétendus « mare-à-bout » et autres religieux « obscurantistes, fanatiques et archaïques », ne se souciant, en réalité, que de la préservation de leurs propres prébendes et celles de leurs bruyantes chapelles rouvertes, de façon tout à fait inconsciente, à leurs troupeaux de « talibés crédules ». Le fameux choc des civilisations maraboutiques, en prélude à la fin de l’histoire des confréries dans ce pays, quoi !

Jusqu’à quand les musulmans de bonne foi continueront-ils de tomber si naïvement dans le piège de ces pyromanes sans foi ni loi dont la religion est le cadet des soucis ?

Quand ?

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